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"Les petits déjeuners philosophiques"

Art et Vérité

                                      Samedi 14 Décembre 2013 (10h à 12h)

  lieu : Atelier "L'oeil et la main"
14 rue du Docteur Mazet
Grenoble


précédents : Lili Reynaud-Dewar
                   Hommage aux fous


Les petits déjeuners philosophiques se veulent des "Ateliers" où seront présentés des textes, des lectures, où s'actualisera mise en question, en perspective(s). Dans un esprit de convivialité (chacun à tour de rôle apportera une boisson, ou une régalade du matin), la philosophie sera entendue comme le lieu d'une interrogation humble et au demeurant construite sur ce qu'est le métier de vivre, mais aussi comme échange, partage de textes et de questions à propos de l'expérience singulière d'être homme, d'être femme.


L'Atelier est d'abord un lieu. Mais un lieu particulier où s'élabore la création - la création c'est à dire la transformation d'un matériau, d'une texture, qui ouvre accès à une représentation possible de ce qui est souterrain.

Représenté par les artistes de manière métaphorique, à la fois forge de vulcain, laboratoire, coulisses, chambre à soi..., ce lieu n'est pas forcément ouvert au grand jour. Cette obscurité vient souligner le propre d'une réflexion et d'une gestation qui s'effectuent dans la lenteur et les méandres du processus artistique.

Ce processus est toujours singulier , qui redit à travers la création, l'importance de certains gestes, mouvements et lieux intérieurs, désir d'ouverture et d'ailleurs.

L'altelier est le lieu où se produit ce chantier, cette écriture en mouvement, toujours en train de se faire, de se défaire de se refaire. Il est un lieu à explorer, une histoire à visiter, la mémoire d'un lien, d'un souvenir, de quelque chose qui résonne, bouleverse et traverse. Il définit l'espace où se crée un lien particulier à soi-même, précisément où s'essayent de nouvelles façons de sentir, de penser, de (re)connaître.

Il est lieu de production, de poïese, c'est à dire du faire qui est attention à ce qu'il transforme, qui est un acte au sens fort du terme - évènement de la création - marquant par la forme ce qui advient.

Comme tel, l'évènement produit toujours un bouleversement énigmatique de la temporalité : retour, superposition, réécriture, figuration, représentation, redoublement, effacement du temps, dépassement. L'objet de l'art est cette élaboration insue, qui rend possible une transformation interne, un passage.

L'atelier est ce lieu intime et paradoxal de la dépossession et des retrouvailles. Il est un lieu où se rencontrent des espaces hors de tout, immémoriaux et chargés de souvenirs, lieux de résonance et d'équivalence d'une forme et des affects.

Hélène Jacquier  

Gérard Mordillat (écrivain et cinéaste)

Personne ne peut résister à la tentation : lorsqu’on s’approche des sculptures de Suzel Galia le premier mouvement est toujours de tendre la main, de les toucher ; de laisser sa paume en caresser les formes, s’attarder sur le rond d’une épaule, le creux d’un dos, le repli d’une cuisse ; de chercher du bout des doigts le sillon qui dessine ici un sexe, là un sein, un sourire, une fossette…Devant les sculptures de Suzel Galia, ces femmes secrètes protégeant leur féminité pour mieux l’exposer, l’esprit est toujours « touché par le désir ». La pierre se fait chair, une chair dont l’œil et la main n’ont de cesse d’éprouver la finesse, la transparence, la texture ; une chair gorgée d’envies lourdes de ses langueurs, traversée de ses doutes, de ses tourments. Une chair vivante, saisie dans son mouvement, dans ses élans et cependant l’exact contraire de l’instantané photographique. Les sculptures de Suzel Galia ne citent pas le temps par fractions, elles le cernent, l’entourent, le minéralisent jusqu’à ce qu’il s’incarne dans la pierre, et demeure dans la durée.Regarder une sculpture demande une attention particulière, une autre forme de regard que celui qu’une toile ou un dessin sollicitent, une attention plus patiente, plus aiguë. Les sculptures - et tout particulièrement celles de Suzel Galia - ne se livrent pas au premier coup d’œil. Peut-être plus que tout autre art plastique, la sculpture est un art pudique ; et il faut partager longtemps la compagnie d’un marbre, d’une serpentine ou d’un granit pour percer son intimité. Cette intimité qui est le centre même du travail de Suzel Galia.La question que pose Suzel Galia à chaque corps qu’elle sculpte est bien celle-là : comment saisir d’un geste ce qui se tait ? Comment saisir le désir, l’attraper par le corps ? Sans doute chaque sculpture apporte-t-elle une réponse particulière à cette question ; la répétition du geste montre, à l’évidence, que la réponse n’est jamais absolument satisfaisante. Mais c’est le geste qui compte puisqu’il n’est autre qu’un geste amoureux.