Quand le langage "s'invite" ... Folie ?!!! ou "contre-folie" ?} - / Art - Poésie /

La langue  mineure « n’est pas une autre langue, ni un patois retrouvé, mais un devenir-autre de la langue(…) un délire qui l’emporte, une ligne de sorcière qui s’échappe du système dominant [Deleuze] ». Ce n’est pas une autre langue actuelle, ni une langue d’un actuel passé, qui appartiendrait à un autre système. Si elle s’échappe du système, c’est en vertu d’un acte de la langue elle-même qui la reconduit à ses conditions réelles d’effectuation (rapport de la langue avec son dehors) et en assume le devenir. Cet acte, c’est  la création d’une syntaxe, d’un style. Divers procédés, divers traitements de la langue sont mis en évidence par Deleuze. Masoch fait « balbutier » la langue, sorte de mise en suspens qui la fait trembler, comme les personnages eux-mêmes devant le fouet. Gherasim Luca la fait « bégayer » en la faisant se reprendre, proliférer, bifurquer et dévier. Kafka la fait « piauler ». Artaud arrache à la langue des « mots-souffles ». Lewis Carroll fait jouer le non-sens, la diversité des non-sens. […] l’important est qu’il y ait un acte spécial, acte créateur qui a pour effet de faire fuir la langue. Cervantès superpose, insère machinations dans machinations, multiplie les histoires et les mondes autour de l’indomptable machine Quichotte.

article : « nous, sorciers… » in Revue Chimères no 68, intitulée « Figures de Don Quichotte »

"La sphère close" du langage de la logique : La Vérité ?...Folie?!!  ou "source" de Folie ? /Logique/

[…] la folie du logicien, qui a ouvert son œil pinéal dans un monde de machines, est absolue, en ce qu’elle suit une logique qui dépasse ce que l’homme en général, avec un cerveau mécanique, doit pouvoir penser. C’est aussi au fond la folie du Malin Génie de Descartes (le Malin Génie, pour me tromper, doit être imprévisible et me dire tantôt le vrai  tantôt le faux, en suivant une logique qui me dépasse, de telle sorte que je ne puisse pas anticiper sur la règle qui détermine s’il dit vrai ou non). Et c’est cette folie que Gödel espère, parce qu’elle peut ouvrir à une connaissance absolue et signifier du même coup la reconquête de cette raison inconsciente qu’on décèle parfois dans son esprit. Et c’est cette folie que Gödel craint parce qu’elle peut aussi bien être l’œuvre du diable qui suggère, sans qu’on comprenne pourquoi, des évidences illusoires, et mauvaises.

 Pierre Cassou-Noguès  Les démons de Gödel – logique et folie    éditions Seuil/points p.249

Elle a un drôle de caractère, la vérité. Comme ces lunatiques qui , un jour, vous adressent d'affables sourires et le lendemain lugubres, vous regardent avec des yeux torves ou menaçants. La vérité est radieuse en effet, quand elle récompense la recherche, quand elle éclate et désintègre erreurs, préjugés, duperies ou impostures. Mais elle est aussi hideuse et odieuse, quand sûre d'elle-même elle s'impose, une et intangible, quand elle se fanatise et s'autorise à exterminer tout ce qui n'est pas sous ses couleurs ou sa juridiction. Elle est la plus belle des valeurs et celle au nom de quoi on commet toutes les horreurs. "Les guerres de vérités" sont la vérité de la guerre.

C'est la raison pour laquelle, au moins du point de vue  philosophique, la notion même de vérité a été peu à peu "dépotentialisée", pour laisser place à l'idée qu'existent seulement des vérités relatives, transitoires, branlantes, ou des interprétations. On n'a pas été cependant jusqu'à jeter le bébé avec l'eau du bain, car il n'est pas besoin de philosopher pour voir que renoncer totalement à l'idée de vérité équivaudrait à rendre interminables, douteux ou nébuleux tous les rapports au monde, à la société, aux autres, à soi-même, et ruinerait la science, l'histoire, la politique, la justice, la morale - sinon le langage lui-même. [...] personne n'est totalement dépourvu du souci d'éviter l'erreur et de ne pas se laisser abuser.  Robert  MAGGIORI, Libération du 07/09/06

 Quand le "verbe" fait défaut ! ... folie ?!!!  /Folie/

 « Il ne sait pas la chance qu’il a (le chien à qui il ne manque que la parole)… il y a des fous qui le sont parce qu’ils sont « déparolés », d’autres parce qu’ils sont noyés, pleins de paroles. Il n’y a plus que ça en eux. »

Fernand  Deligny 

La question du passage de l’agir désintéressé au faire productif, normatif, communicatif, en un mot social, est donc cruciale. Deligny n’a pas imaginé la tentative comme un laboratoire d’observation entomologique ou de réflexion philosophique. Il ne peut pas non plus guérir l’autisme dans lequel il voit une alternative à l’assujettisement et une richesse inexplorée de formes poétiques et plastiques. Les autistes permanents, Janmari, Gilles T., Christophe B., font partie du réseau d’origine. Ils vivent, mangent, coupent du bois, font la vaisselle : autistes, non-sujets, non-désirants, non-violents, apaisés.

Fernand  DELIGNY  (1913-1996),  créera des « lieux de vie alternatifs » pour prendre en charge des enfants délinquants ou autistes.