Atelier  Philo

Le réel comme présence ou comme croyance ?

[Thème : L'origine de la notion de réalité]

Mardi 16 Avril  2013 à 20h30


Lieu : le Ness
3, rue Très-Cloîtres Grenoble (tél. 04 76 54 44 71)


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L’ATELIER PHILO…

Historiquement, « l’atelier philo » s’inscrit à la fois dans la continuité et la rupture des « cafés philo » des années 1995-2005.

-          Dans la continuité, car il ne s’agit pas de conférence, ni d’exposé, (même suivi d’un débat), de la part de quelqu’un qui, possesseur d’un savoir, viendrait le transmettre ; chaque participant, quelle que soit sa compétence, s’exerce à exprimer son propre point de vue, sur lequel il permet ainsi, à chacun, d’opérer un travail de compréhension et de critique.

-          Dans la rupture aussi, par conséquent, car ce travail en commun devient l’aspect principal de l’atelier.

Le thème retenu – actuellement : « L'origine de la notion de réalité » - ne change pas à chaque séance, mais se poursuit sur plusieurs mois, voire l’année…Il donne lieu à une présentation personnelle au début de chaque séance (qui peut être mise en ligne quelques jours avant la réunion), et chaque participant est invité à rédiger une « trace » (compte rendu ou réaction subjective) distribuée la fois suivante, mais également consultable sur ce site.

  1.                      Atelier du 16 avril 2013 ( exposé rédigé )

    « Le réel comme présence et croyance »

     

     

    « La séance sur l’intelligibilité du réel a souligné l’impossibilité pour l’esprit humain fini de comprendre la totalité infinie. Depuis la Renaissance, les sciences nourrissaient pourtant l’espoir d’un progrès indéfini de la connaissance, qui est lui-même devenu problématique avec la découverte des principes d’incertitude en physique quantique, d’indécidabilité en mathématique… C’est non seulement l’univers, mais aussi ses parties finies, qui échappent à tout savoir absolu. Cela ne condamne pas pour autant les avancées scientifiques, mais le réel dont elles se saisissent est toujours objectivé, médiatisé par la science. Son intelligibilité se résume aux propositions et aux équations, dont il faut sans cesse vérifier la conformité aux phénomènes naturels.

     

    Ce réel construit et vérifié par les procédures scientifiques, qui ne peut jamais atteindre  « la chose même », possède sa valeur propre et imprègne notre vie et nos représentations. Mais il semble (ce sera le thème de cette séance) que l’intelligibilité scientifique n’épuise pas notre quête du réel. La science ne peut répondre, et ce n’est pas son propos, à notre questionnement existentiel sur le réel : qu’est-ce qui fait que tel phénomène se présente à ma conscience comme réel, ou pour le dire autrement que je crois en sa réalité brute, en l’absence de toute vérification ? Avant toute intelligibilité, il y a toujours un surgissement du réel, alliant présence et croyance, qu’on l’interprète classiquement comme la rencontre entre une conscience et un objet préexistant, ou comme un état singulier de la conscience, un « effet  de réel » indépendant du monde extérieur.

     

    Parallèlement aux sciences, certains développements de la philosophie contemporaine, et certaines expériences de pensée à la limite du pensable, ont continué à rechercher cette empreinte du réel dans la conscience, en deçà de son intelligibilité :

     

    ·                        La phénoménologie défend, à côté de la construction scientifique, la dignité et la vérité des phénomènes, et cherche à décrire leur mode d’apparition dans la conscience. Prenant l’exemple d’un cube à 6 faces, Merleau-Ponty distingue la vérité géométrique du cube, de la vision réelle qui ne peut jamais percevoir simultanément toutes les faces. L’exemple résume bien l’entrelacement entre présence et croyance dans la manifestation du réel : la vérité du cube exige à la fois la présence des facettes visibles et la croyance dans la persistance des faces cachées. Le réel exige donc de la conscience la croyance dans sa propre permanence.

     

    ·                        D’un tout autre point de vue, la vision mystique met également l’accent sur l’irruption du réel dans la conscience. Le réel est saisi comme présence pure, indépendamment de toute réalité objective. Précédant toute interprétation religieuse, la vision mystique, le « sentiment océanique » de Romain Rolland, est reconnue et étudiée comme un mode de pensée limite mais effectif, accédant à une autre perception du réel. Ce qui est vécu comme une présence aigue, un surgissement du réel hors de tout cadre préconçu, peut être conceptualisé et conduire à une croyance, dans un deuxième temps.

     

     

    ·                        D’un côté, une démarche rationnelle et rigoureuse pour extraire le réel de nos faits de conscience dans l’approche phénoménologique. De l’autre, une manifestation spontanée et éclatante du réel dans la vision mystique. Dans les deux cas, le réel s’impose comme tel à la conscience dans laquelle il naît, tout en renvoyant à une réalité extérieure problématique. La présence du réel dans la conscience s’impose et ne se discute pas en tant que telle ; la réalité approchée par la conscience dans son appréhension du réel reste en grande partie question de croyance.

     

     

    ·                        Une troisième piste, inclassable, tient à la fois de l’approche rationnelle, conduite avec soin sur une longue durée, et du surgissement imprévisible du réel : la cure psychanalytique. Si, comme le soutient Lacan, les « mots nous manquent » pour exprimer le réel, l’analyste doit poursuivre et faire surgir le réel au-delà des mots. Comme dans la phénoménologie, la découverte du réel dans l’analyse exige une méthode ; comme dans la vision mystique, le réel peut se manifester avec violence, en se libérant de tous les cadres préconçus. Comme dans les deux premiers cas, la forte présence du réel, dans la libération des mots, ne renvoie pas pour autant à une réalité clairement identifiée en dehors de la conscience, « l’inconscient » restant peut-être affaire de croyance. »

     

    Régis Lecu.

     

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Fin du thème : Peut-on penser/maîtriser le changement ?

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